Rapport de stage au Honduras

Produit par Michèle Clément
Remis à Mer et Monde

Date de départ : Vendredi, 28 décembre 2001
Date de retour : Jeudi, 7 février 2002
Durée du voyage : 41 jours au Honduras, Amérique Centrale

31 jours de travail humanitaire à Tegucigalpa au sud et
10 jours de vacances au nord du Honduras

Liste des organismes visités incluant ceux où j'ai œuvré :
- Quatre (4) garderies : Villa Nueva, Los Pinos, Flor del Campo, Don Bosco
- Reliés aux jeunes de la rue : Maison Belen, Agape, Casa Iasenza
- Une maison qui accueille les personnes porteuses du Sida
- Une coopérative de boulangerie à Pueblo Nuevo
- Une famille d'accueil près de Nuevo Conception
- Le village de Ojojona
- La prison des femmes à Tamara

TABLE DES MATIÈRES

Préambule - Postulat de voyage - Introduction
Vendredi, 28 décembre 2001
14h45 : J'atterris à San Salvador
Samedi, 29 décembre
Visite dans une famille à la campagne, puis dans un village colonial .
Lundi, 31 décembre
Souper du Nouvel An et feux d'artifices
Mardi, 1er janvier 2002
Visite à pied, dans la campagne derrière la maison
Mercredi, 2 janvier
Garderie Villa Nueva; Centre Agape; Santa Rosa; Nuevo Conception
Jeudi, 3 janvier
1ère journée dans une garderie : Garderie de Villa Nueva
Vendredi, 4 janvier
A.M. : Visite du quartier Los Pinos et dîner chez Ophélia
P.M. : Visite en autobus à Belen
Visite à la Cathédrale St-Michel Archange
Visite du marché public - au stade
Qui sont les filles de Belen ?
Samedi, 5 janvier
Baie de Fonseca : journée à la mer
Lundi, 7 janvier
Nettoyage à la maison Mer et Monde
Préparer la rencontre avec les filles de Belen
Retour en autobus avec Ricardo - arrêt au café internet
Souper en présence de Marc
Bilan
Mercredi, 9 janvier
A.M. : à Koinonia en formation avec les mères éducatrices
P.M. : à Belen
Jeudi, 10 janvier
Dimanche, 13 janvier
Journée à Ojojona
Mercredi, 16 janvier
A.M. : à la Garderie Flor del Campo
P.M. : à Belen avec Martin
Soirée : arrivée de 6 coopérants
Jeudi, 17 janvier
Vendredi, 18 janvier
2e visite à Ojojona - jour de la Fête de San Sebastian
Lundi, 21 janvier
A.M. : à Los Pinos : la Clinique de santé et les environs
P.M. : à Belen
Mardi, 22 janvier et mercredi, 23 janvier
A.M. : à la Garderie Flor del Campo
P.M. : à Belen
Jeudi, 24 janvier
24 heures au village de Pueblo Nuevo
Dimanche, 27 janvier
Visite à la prison des femmes
En résumé
Ce que je retiens de mon séjour au Honduras
Mes réalisations
Ce que j'ai surtout apprécié
Ce que j'ai trouvé difficile
Matière à réflexion… pour aller plus loin
Le mot de la fin

Préambule
En août dernier, je participais à une formation dans les Cantons de l'Est. À l'heure du lunch, j'ai échangé avec une participante venue spécialement de France pour suivre cet atelier. Elle m'a expliqué que c'est à partir d'une déclaration , faite à elle-même, que tout s'est mis en place pour qu'elle soit ici aujourd'hui et cela sans effort. J'ai mis à mon tour en application cet information et j'ai déclaré que je partirais en décembre pour un séjour de 40 jours dans un lieu qui m'était inconnu à ce moment-là.

Aujourd'hui, le 28 décembre, j'atterris à Tegucigalpa (Tegus), au Honduras.

Entre ciel et terre - dans l'espace aérien entre Dorval et La Havane (1ère escale), je me sens dans un état de liberté intérieure.

Postulat de voyage
- Voyager et partager mes connaissances
- Expérimenter le travail humanitaire et contribuer là où je serai
- Observer et savoir me taire au besoin
- Avoir du plaisir et des surprises agréables
Introduction
J'ai produit ce rapport à partir de mon carnet voyage. À tous les jours, avant de dormir, je faisais le bilan de ma journée en pensée et par écrit. J'ai choisi de reproduire les faits marquants.

Je suis revenue enchantée. J'ai fait un voyage merveilleux.
Le succès de ce projet est dû au fait que j'ai su m'adapter peu importe les situations dans lesquelles je me suis retrouvée.

Vendredi, 28 décembre 2001
- 14h45 : J'atterris à San Salvador

Je fais le tour de l'aéroport, puis je me rends à la porte d'embarquement du prochain avion, et je m'endors. Au réveil, le tableau d'affichage a changé. On annonçait : Départ pour Tegucigalpa à 4h10, et maintenant on affiche l'heure du vol pour Los Angeles. Je me demande si j'ai raté l'avion. Je cherche de l'aide et réussis à me faire comprendre malgré les limites que je connais avec la langue espagnole.

Quelqu'un m'indique la Porte 16. Rendue à cette porte, je m'assoies en attendant l'heure de l'embarquement. Une femme prend place à mes côtés et elle me parle en espagnol. Je lui dis : « Yo soy voluntaria " … et je donne mon prénom. Elle me demande où et avec qui… Je lui réponds du mieux que je peux. Elle me demande ensuite si on m'attend à l'aéroport et si j'ai un numéro de téléphone… Je lui montre les coordonnées de Martin de la Casa Clara-Lauzon (Mer et Monde). Elle me donne un demi Lempira pour téléphoner à Martin.

C'est le monde à l'envers. Je suis venue ici pour apporter ma contribution… et je reçois avant même de commencer.

- 17h30 : Arrivée à Tegus
Martin est là tout souriant… un sourire plein de sa chaleur. Il m'offre de marcher jusqu'à la maison, j'approuve… j'aime marcher.

Samedi, 29 décembre
Visite dans une famille à la campagne, puis dans un village colonial

Les gens vivent leur quotidien dehors : pila (planche à laver), douche et toilettes extérieures à plusieurs endroits.
Les animaux se partagent la rue : Vaches, chevaux, ânes, coq, poules et poussins, chiens et chats, sans oublier les vautours. Mais quelle maigreur ! Ils n'ont que la peau et les os… j'ai un choc, je ne m'y attendais pas du tout.

Dans le village colonial où nous étions, il y avait un musée. Martin s'est informé pour qu'on puisse le visiter. Le gars qui avait la clé était absent et devait être de retour dans 30 minutes. On a attendu et il n'est pas arrivé.

Leur vie semble sans histoire. Le rythme est au ralenti.

Lundi, 31 décembre
Souper du Nouvel An et feux d'artifices

Il y a du mucus dans ma gorge… un peu plus à chaque jour. Il m'est presque impossible de dire… de me dire… je ne parle pas la langue.

Ma communauté n'a pas d'écoute quand je partage mes connaissances… quand je me partage. Heureusement que ma maison intérieure est assez solide… je n'ai point besoin d'être ébranlée… Je constate.

Sortie ce matin avec Martin et Christophe… On a rapporté la camionnette à Jorge puis on s'est rendu ensemble à Agape, le centre des jeunes garçons de la rue. Christophe se dit dépassé… pu personne ne gère le centre. Les jeunes n'ont plus d'encadrement… ça traîne, c'est malpropre… y'a des filles et des bébés.

Nous sommes revenus à pied au centre-ville…

Une partie du marché est dans une rue piétonnière... les marchands installent leurs marchandises sur des couvertures… l'armée se promène partout… les militaires ont accepté que je les photographie.

L'autre partie du marché est à l'intérieur… c'est bondé de monde.

On a fait les achats pour le souper réveillon de ce soir. Ensuite, on a pris l'autobus en direction de la maison. On est rentré à 11h15 a.m.

Je me sens fatiguée… je vais m'étendre dans le hamac. Au réveil, j'ai passé le balai dans la salle de séjour, puis j'ai aidé Christophe à préparer le souper du Nouvel An : Crevettes, poisson dans un court-bouillon, patates rôties, salade, vin, pain et margarine.

Je me fais une liste de mots clés dans les deux (2) langues.

Souper du Nouvel An : Tous ensemble, on se prépare pour le souper du Nouvel An. Il a été convenu d'inviter Martin et Sally à souper avec nous. Il y a aussi Gérard et ses deux (2) sœurs Marthe et Marie. Au total on est 10 à table.

Et les feux d'artifices ont commencé… Ça « saute » un peu partout dans la ville. C'est impressionnant.

Mardi, 1er janvier 2002
Visite à pied, dans la campagne derrière la maison

… là où les gens vivent dans une maison fait de plastique, avec leurs animaux : chevaux, vaches, vaux.

Tout à côté, il y a des hommes qui produisent des briques d'adobe , de façon manuelle. J'ai vu un homme qui se tenait debout dans le mélange et qui le piétinait jusqu'à consistance désirée. Par la suite, les briques sont moulées et cuites.

Nous avons aussi traversés un quartier aisé, là où chacun possède son bungalow. Et tout à côté, des gens très pauvres sont en train de s'installer un « chez-soi » sans autorisation.

Nous sommes ensuite rentrés en autobus. Dans l'autobus, un homme s'est levé et m'a cédé son siège. C'est naturel pour eux d'agir ainsi.

Mercredi, 2 janvier
Garderie Villa Nueva; Centre Agape; Santa Rosa; Nuevo Conception

Levée à 6h, déjeuner et départ à 7h30 tous ensemble. Martin a accès à la camionnette du Padre Eduardo. On reconduit Francine, Carole et Raynald à la garderie Villa Nueva… puis, Christophe et 4 jeunes de Agape à Santa Rosa… et on continue à Nuevo Conception.

Quartier de Villa Nueva : C'est tout un art de circuler dans ces rues en terre; quand elles sont mouillées, ça devient de la boue. En plus, les rues sont en pente raide… Ça me rappelle quand je monte le Mont-Royal à pied par l'intérieur.

Depuis peu, dans la rue à l'entrée du quartier, au pied de la pente raide et jusqu'en haut, 2 longueurs de ciment ont été creusées en parallèle dans la terre, à une distance de roues d'une voiture. Grâce à ces 2 longueurs de ciment, il devient plus facile à pied aussi bien qu'en auto de monter la côte. Chacune mesure 1½ à 2 pieds de largeur. Pour monter la côte, l'auto installe ses 4 roues sur les bandes de ciment. à une distance de lignes d'environ 1 pied et demi à 2 pieds.
De Agape à Santa Rosa : Puis avec Christophe, on s'est rendu à Agape - un centre pour les garçons de la rue. Christophe est allé chercher les 4 jeunes hommes qu'il accompagne dans un projet de construction à Santa Rosa.

Nuevo Conception : C'est ici que Martin stationne la camionnette, lieu du barrage qui fournit l'eau à Tegus et on part tous les deux à pied dans la montagne. Une heure de marche pour arriver jusque chez Marc, un autre coopérant. Marc demeure dans une famille, à la montagne, en pleine nature, parmi les ânes, chevaux, coq, poules, chiens et chats. On nous a donné à manger : une soupe repas… les légumes étaient savoureux. Juste avant le repas, on nous a offert des bananes fraîchement coupées. Quel délice !
Puis nous sommes revenus à pied jusqu'à la camionnette et de là à Tegus.
Il est 8h30 p.m. et je suis prête à me coucher. À Tegus, c'est poussiéreux et je tousse.

Jeudi, 3 janvier
1ère journée dans une garderie : Garderie de Villa Nueva

À la garderie, les grands de 7-8 ans arrivent avec leurs petits frère / sœur sous le bras, et avec les bébés sur la hanche. Les enfants sont responsables même très jeunes.
Aujourd'hui, il n'y avait pas de collation avant le dîner. On a animé de 8h45 à 11h45/12h, sans arrêt. Au dîner, il y avait un poulet pour 20 à 30 personnes, du riz et du chou non nettoyé. La cuisinière fait des miracles avec peu de moyen... en fait tout le monde fait des miracles avec rien. À la collation, il y avait des beignes faits maison. Martin aidait la cuisinière.
Ce que je retiens de cette journée : c'est qu'à travers des stimulations, les enfants avaient les yeux plus ouverts / éveillés à la fin de la journée. J'ai aimé ma journée.

« J'ai du temps libre et je ne sais pas quoi en faire.
À part travailler, quoi d'autre ?»
Réflexion qui est montée, au retour d'une journée… la 1ère à la garderie.

Vendredi, 4 janvier
A.M. : Visite du quartier Los Pinos et dîner chez Ophélia
P.M. : Visite en autobus à Belen
Visite à la Cathédrale St-Michel Archange
Visite du marché public - au stade

Ricardo m'a fait rencontrer des familles à Los Pinos. J'ai aussi pu voir la contribution d'un groupe de jeunes coopérants - niveau secondaire. Ils ont installés des pneus en forme d'escalier permettant de monter et descendre d'une maison à l'autre. Les « rues » sont en pentes raides. C'est un art d'y circuler du moins pour nous.

Événement traumatisant : à Los Pinos, j'ai vu un chien qui se promenait dans la rue avec soit des hémorroïdes extérieurs ou soit des gros boutons rouges sang collés à ses testicules. Je ne m'y attendais pas… je n'y étais préparé. Quel choc !

Par la suite, Ophélia nous a reçu à dîner. Au menu : un plat de riz bouilli auquel elle a ajouté du lait chaud, du sucre et de la cannelle. C'était délicieux… (à la condition d'oublier la vision du chien).

Visite par autobus à Belen avec Ricardo. Quand nous sommes arrivés à 13h15, chacune vaguait à quelque chose. Ricardo et moi, nous sommes assis sur le bord d'un lit dans un dortoir au 2e étage et on a attendu. Après un certain temps où il ne se passait rien, on en est venu à se demander : Qu'est-ce qu'on fait là ? Puis, certaines sont venues et les enfants ont suivi. On a échangé.

Au début, elles étaient gênées, puis au fur et à mesure, la gêne a fondu comme de la glace au soleil et elles ont souhaité nous revoir. On a convenu de revenir lundi après-midi : Je leur apprends le français… elles m'enseignent l'espagnol et la danse.

Nous sommes allés les visiter à tous les jours, du vendredi 4 janvier au mercredi 23 janvier. Une des filles nous a aussi demandé de l'accompagner à la prison des femmes pour aller voir sa mère. Nous l'avons accompagnée dimanche 27 janvier.

« Les jeunes de Belen ont soif d'apprentissage. Dès qu'on arrive, elles nous demandent : Qu'est-ce que tu nous apprends aujourd'hui ?»

Notre programme de base à chaque jour à Belen

- du physique : Ricardo leur fait dépenser leur surplus d'énergie… il les fait bouger, faire des culbutes, courir, etc.
- un spectacle : Ricardo fait du théâtre, des jeux d'expression, et de la magie avec des cartes, des pièces de monnaie, etc. … par la suite, ils tentent de découvrir ce qui se cache derrière la magie.
- la leçon de français : j'enseigne la conversation française : « Bonjour… Comment ça va ?… Je m'appelle… J'ai 'x' ans (l'âge)… » …les parties du corps, les 5 sens, les jours de la semaine, les couleurs, le nom des animaux… Ils apprennent aussi à compter, etc…
- une période de coloriage, des jeux d'adresse et de concentration, etc.
Fait intéressant : Elles prennent en note tout ce qu'on leur enseigne… Elles écrivent en espagnol, en français, parfois en anglais, et au son.

Qui sont les filles de Belen ?

Ce que j'ai compris de ce que j'ai vu et entendu à propos des filles de Belen : Ce sont des filles de tout âge. J'ai vu des bébés en couche (pas de couche) avec ou sans leur maman.

Les mamans qui vivent à Belen, sont au début de la vingtaine. À titre d'exemple : Une de plus nos fidèles participantes est âgée de 20 ans. Elle se s'appelle Carmen Marìa Grìas Alonzo (Carmen). Elle est la mère de 2 enfants : Nicole, une fille de 3 ans et Kevin, un fils de 2 ans.

Certaines filles de la rue ont 4-5 ans. Leurs mères (souvent des prostituées) les amènent ici… parfois, elles viennent les voir et d'autres fois, non… elles ne reviennent pas. Il y a aussi des petits garçons. Le plus vieux avait 10 ans.

Ma définition d'une fille de la rue : c'est une fille qui vit dans la rue. Sa maison, c'est la rue. Elle ne pratique pas nécessairement la prostitution.

Samedi, 5 janvier
Baie de Fonseca. : journée à la mer

C'est la baignade pour tous. Découverte du jour : Dans la vase, il y a des minis étoiles de mer.

Autre fait : À marée basse, on peut marcher longtemps avant d'avoir assez d'eau pour nager. Je me suis blessée sous le pied droit en marchant sur des roches pointues et coupantes. J'ai utilisé de l'argile blanche et mon pied a guéri en 2 jours.

Lundi, 7 janvier
Nettoyage à la maison Mer et Monde
Préparer la rencontre avec les filles de Belen
Retour en autobus avec Ricardo - arrêt au café internet
Souper en présence de Marc
Bilan

« Les soirées sont plates. Je me sens isolée, seule dans le groupe.»

Ce soir, dès que je suis rentrée dans ma chambre, les gens sont revenus dans la salle autour de la table et se sont mis à rire… l'énergie circulait entre eux… ça ne se passe pas comme cela en ma présence.

Est-ce que j'amplifie ? Peut-être… en tout cas, c'est choquant. Qui je suis, qui j'exprime rend ces gens inconfortables et certains déplaisants.

Je prends conscience que c'est facile de mettre quelqu'un de côté.

Dans cette situation, il faut juste que je reconnaisse que je ne peux m'entendre avec tout le monde et tout le monde ne peut pas s'entendre avec moi.

Mercredi, 9 janvier

A.M. : à Koinonia en formation avec les mères éducatrices
P.M. : à Belen

À Belen : Quand on est arrivé là-bas, on a vu que les matelas et la télévision avaient été descendus dans la salle et, certaines femmes et enfants dormaient là malgré que la télévision soit à tue-tête… la chambre était devenue une chambre. On est allé jouer dehors sur le balcon sans rampe puis dans la rue. Il y a une dénivellation dans la rue de presque trois (3) pieds entre deux (2) endroits… trous et bosses se succèdent.

Au début, ils sont 15 personnes de bébé à 20 ans… les enfants des environs se sont joints… le groupe grossit jusqu'à une vingtaine. Les bébés en couche n'ont pas de couche, tandis que les grands se dépouillent entre eux... comme je l'ai vu à la plage dimanche dernier : 2 femmes assises dans la mer s'enlevaient des poux et des larves, tout naturellement.

Je suis surprise de voir l'état de santé des pieds des enfants et des plus grands : Peu ou pas d'égratignures, même s'ils marchent pieds nus dans la rue ou sur les roches.

Jeudi, 10 janvier
A.M. : à Koinonia en formation avec les mères éducatrices
P.M. : à Belen

À Belen : À notre arrivée, c'était l'anarchie : la télévision était ouverte… chacun courrait dans toutes les directions… ça parlait fort… puis ils ont mangé. Dès qu'ils ont eu mangé, tous se sont calmés instantanément. C'était impressionnant à voir.

Par la suite, une petite fille est venue vers moi, je l'ai prise dans mes bras et dès que sa tête s'est appuyée sur mon bras droit, elle est tombée endormie, les mains jointes. Elle ressemblait à un ange.

Dimanche, 13 janvier
Journée à Ojojona… un village de 8,000 habitants, à 35 km de Tegucigalpa

Départ en autobus avec Martin, il va rendre visite à Marc dans sa famille d'accueil.
De Ojojona, Martin doit marcher en montagne 1h30 aller et autant pour le retour. Pendant ce temps, je suis restée au village. Au début, je ne savais pas trop où aller… je me suis dirigée vers et tout autour du cimetière… je suis ensuite revenue vers la place centrale.

Puis un homme est sorti de chez lui et il m'a dit : « Buena Dias ». je lui ai répondu la même chose. Par la suite, il m'a parlé en français et en anglais. Quelle surprise! Il se prénommait Oscar.

Oscar m'a ensuite offert de visiter le village et j'ai accepté. Il m'a présenté des gens dont M. le maire, son conseiller, M. le Curé (Pierre), d'autres notables de la place. Il m'a fait visiter des commerces d'artisanat, une épicerie, les arrière-boutiques, les cuisines, les cours arrière, tout… Quelle privilège !

Il m'a aussi présenté deux (2) hommes (Eduardo et ?) qui échangeaient devant une maison. C'était la maison de l'un d'eux. Il m'a invitée à entrer… je ne savais pas quoi faire et j'ai accepté… les trois (3) hommes sont rentrés derrière moi et le dernier a fermé puis verrouillé la porte. À ce moment-là, je me suis demandée si je devais me sauver en courant ou rester là... je suis restée et j'ai bien fait. Une des filles d'Eduardo est venue au salon, puis j'ai rencontré d'autres membres de sa famille… ces hommes m'ont demandé d'enseigner le français aux jeunes… ils reçoivent déjà des cours d'anglais d'un organisme d'aide des États-Unis.

Oscar m'a ensuite ramenée chez lui… il m'a présenté sa mère (66 ans) et sa
grand-mère (8? ans)... il m'a offert un bol de soupe hondurienne... un bouillon avec légumes variés (carotte, blé d'inde, racines de yucca, chou, et plus encore)… un vrai délice.

Je l'ai quitté rapidement (et remercier). J'avais convenu avec Martin qu'on se rejoindrait à la place centrale pour 1h30. Quand je suis arrivée Martin était déjà là, je lui ai parlé de Oscar et je le lui ai présenté. Martin a dîné chez Oscar aussi. Par la suite, tous ensemble, on est allé visiter une église barrée sous clé et débarrée par une femme de la place. On s'est rendu jusqu'au clocher. On a ensuite quitté à nouveau Oscar avec la promesse que Martin l'aide et que je revienne au village. Puis on a repris l'autobus. On a eu le temps de dormir et on est rentré contents.

Oscar m'a dit avoir travaillé pour l'ONU… il était agent de liaison entre les militaires et les civils… il a voyagé à travers le monde durant quelques années et maintenant il est content d'être rentré dans son village. Il s'implique dans différents organismes du village. Il est fier de son village.

Ce que je retiens de ma journée à Ojojona :
1. les gens rencontrés sont dynamiques, sympathiques... la vie communautaire y est très active.
2. les rues sont propres, un peu moins la rue principale. il y passe beaucoup de monde.
3. les animaux sont malades, tremblant, maigres, etc.
4. les arbres sont immenses et de formes géantes et variées. J'ai vu un pin dont les branches ont la forme d'un humain immense. J'ai aussi pris la photo d'un arbre qui a la forme d'un parasol géant. Il a été ensemencé il y a 24 ans, en 1978.

Mercredi, 16 janvier
A.M. : à la Garderie de Flor del Campo
P.M. : à Belen avec Martin
Soirée : arrivée de 6 coopérants

Il est possible d'aller à la garderie Flor del Campo à pied à partir de notre résidence. J'ai accompagné Francine ce matin.

Souper et soirée : Nous sommes « 12 à table »… la joie règne… ces gens apportent la joie de vivre, des chants, de la musique… en toute simplicité. Ça fait du bien.

Jeudi, 17 janvier

Au déjeuner ce matin, la fête continue… pendant que certains chantent et pratiquent l'espagnol, d'autres échangent…

Francine nous a accompagné à Belen. Les filles sont contentes de nous voir arriver tous ensemble

Vendredi, 18 janvier
2e visite à Ojojona - jour de la Fête de San Sebastian

Cette fois-ci, on s'y rend en autobus avec Sally et les autres (8) sans Martin. En arrivant au village, on prend la direction du cimetière… arrivés à la hauteur du commerce de Maribel, elle sort en nous criant : « Hola !, venez, entrez, Oscar vous attend. »

Quel accueil ! (encore une fois… comme la 1ère fois). Cette fois la différence c'est que je venais présenter Jeanine et Fernand à Oscar. Tous les deux (2) sont intéressés à enseigner le français (2 anciens profs) et en plus, ils sont ici pour 3 mois. Tous les deux (2) sont tombés en amour avec le village, les gens, tout et tout.

Au dîner, Marc qui vit dans une famille à la montagne, s'est joint à nous. À la fin du repas, il m'a (nous) a donné une leçon : il a pris les restes (bons) de nos assiettes et il les a partagé avec les jeunes enfants autour de notre table. Les jeunes ont pris leur part et ils sont partis. Ça n'a pas fait de rassemblement.

C'est aussi jour de fête dans le village… c'est la fête de San Sebastian.
Historique… voici ce que j'ai compris : Il fut un temps où une guerre existait entre deux (2) villages, jusqu'à l'arrivée d'un/des religieux. En venant s'installer dans le village, ils ont travailler à ramener la paix. Depuis ce temps, une fois l'an, une statue portée par les paysans descend de ces deux (2) villages. Arrivés au village, un représentant de chaque village entame une danse rituelle sur la grand rue près de la place centrale. Chacun va à la rencontre de l'autre au son de la musique.

Lundi, 21 janvier
A.M. : à Los Pinos : la Clinique de santé et les environs
P.M. : à Belen

Visite de la clinique de santé à Los Pinos. Juste à côté de la clinique, il y a un four à rebuts, c'est là que sont brûlés les déchets médicaux. On y a trouvé des médicaments à demi brûlés (des pilules pour le diabète).

Au cours de cette visite, on a aussi rencontré le Padre… un québécois qui vient de Beaumont au Québec… il vit ici depuis plus de 30 ans.

On est ensuite allé saluer deux (2) familles : La famille d'Amanda et celle de la sœur d'Ophélia.

Sur le chemin du retour, je marchais avec Nicole, quand une femme portant un enfant s'est approchée pour nous parler. On a demandé à Ricardo de nous traduire. Elle nous racontait que sa fille est paralysée depuis 5 ans, suite à être tombée d'une auto à l'âge de 2 ans. Elle a aussi ajouté que les médicaments sont dispendieux et non fournis par la clinique médicale. La situation nous a touché. La dame a marché avec nous, en direction de l'autobus. Gilles a porté l'enfant et il a aidé la maman.

À Belen : Nicole et Jeanine nous accompagnent… Belle expérience.
Dix (10) petits se présentent avec Carmen. Tous parlent français. Une petite a fait pipi sur moi… l'après-midi s'est bien déroulée.

Mardi, 22 janvier et Mercredi, 23 janvier
A.M. : à la garderie de Flore del Campo
P.M. : à Belen

Nicole est venue avec moi à la garderie. Ça représente une marche de près d'une heure de la maison Mer et Monde… on en a profité pour échanger, rire et découvrir le quartier.

À la garderie, j'ai aidé un petit garçon à écrire le chiffre zéro (0)… au début, il répétait (en espagnol) : « pas capable, pas capable, pas capable »… J'ai pris sa main et j'ai répété : « oui, t'es capable, oui, t'es capable »… et il a réussi. Il était tellement content… j'étais contente aussi… ma joie venait de sa joie.

Au cours de ce même avant-midi, je suis tombée en jouant en grand groupe à un jeu semblable « Au petit cochon ». Dans ce jeu, tous sont assis en cercle sauf un… celui-ci tourne autour du groupe avec un objet qu'il doit déposer derrière un joueur… après avoir déposé l'objet, il doit courir le plus possible vers la place laissée libre par le 2e joueur.

Au cours du jeu, j'ai parlé en espagnol… avec les limites que je connais avec la langue… Olga, la mère éducatrice a bien ri de mon espagnol… je me suis dévalorisée et j'ai tombé… bien que l'événement soit sans importance, (un détail) je me suis tout de même dévalorisée… Heureusement, que j'en ai pris conscience… je n'ai ressenti aucun malaise par la suite.

À Belen : Jeanine et Fernand sont venus avec nous. Pendant qu'ils enseignaient le français aux filles, je me suis occupée de Kevin, le fils de Carmen et ainsi elle a pu pratiquer son français avec Jeanine et Fernand et dessiner.

Deux mamans, Bessy et une autre, se sont jointes au groupe pour la 1ère fois et elles ont dessiné. Durant qu'elles dessinaient, je les ai observé... elles ressemblaient a deux petites filles... elles étaient tellement prises par leur création qu'elles en oubliaient le reste. Je fus touchée par tout ce que je voyais ici.

Sur le chemin du retour, on a rencontré un « fou » au centre-ville. Il a lancé une bouteille par terre, elle s'est brisée et Jeanine a été coupée à jambe. J'ai sorti l'argile et l'ai appliqué sur la plaie… ça nettoie des corps étrangers et ça aide à la cicatrisation. On a ensuite pris l'autobus pour rentrer à la maison.

Jeudi, 24 janvier
24 heures au village de Pueblo Nuevo

Départ pour le village de Pueblo Nuevo en autobus à 10h30 avec Ricardo, Gilles et Jacqueline. Le trajet dure 3 heures. - Martin, Nicole, Fernand et Jeanine iront à Belen à notre place.

Tout au long du parcours après avoir quitté la route principal, je regardais le chemin de terre rouge… et les larmes montaient… je ressentais les mêmes émotions que lorsque je parle à mes enfants après une longue absence… une expérience intrigante et intéressante à la fois.

Gilles est venu faire une visite de prospection… il veut mettre ses compétences de médecin à la disposition des gens du village… il lui reste à identifier une date…

Pour la nuit, nous avons été accueillis dans quatre (4) familles différentes… j'ai dormi dans une famille… là où les gens viennent écouter la télévision… dans la même chambre que la fille aînée de la famille et sa petite sœur.

Je me suis réveillée en pleine nuit… j'ai entendu le concert des coqs, puis celui des chiens et enfin, le bruit de l'autobus qui quittait le village.

À 5h30 du matin, on s'est levé et on a marché 30 minutes pour prendre l'autobus dans le village suivant… ça sentait bon les arbres.

Dimanche, 27 janvier
Visite à la prison des femmes

Réveil à 5h45 am… Départ à 6h15… j'ai rendez-vous avec Ricardo à Las Brisas… il a couché chez un ami… je le prends à l'arrêt d'autobus… et nous nous rendons à Belen… nous sommes attendus pour 7h… Carmen nous a invités à aller voir sa mère Aïda Alonzo, en prison depuis 2 ans.

Carmen a 20 ans… elle est la maman de Nicole qui a 3 ans et de Kevin âgé de 2 ans. Sa mère est en prison depuis 2 ans et le père des enfants de Carmen est lui aussi en prison. À ce moment-là, c'est tout ce que je savais.

À 7h, nous sommes à Belen… 1er choc... j'apprends que Yuvimy est le frère de Carmen... il viendra lui aussi, avec Nicole et Kevin, les 2 enfants de Carmen... C'est un choc de découvrir que ce petit garçon de 10 ans à qui j'enseigne le français depuis 1 mois... est tout d'un coup, le frère de Carmen... je ne m'y attendais pas... ces jeunes de la même famille, sont éveillés, vifs et brillants… et ils ont soif d'apprendre… ils en veulent plus et plus.

2e choc: Nicole est assise sur moi et Carmen me donne une paire de souliers
lacés pour la chausser… les souliers sont trop petits pour elle… j'en avise Ricardo qui traduit… elle va en emprunter une paire à Bessy sa sœur... Nicole n'a même pas de souliers... et je ne m'en étais pas aperçue... pourtant je la vois à tous les jours depuis 1 mois.

3e choc: Yuvimy a emprunté le pantalon de quelqu'un d'autres... Comme ils
sont trop grands pour lui, il se coupe un tout petit bout de ficelle rouge, juste la grandeur dont il a besoin et pas plus... je suis émue, touchée : quelle débrouillardise!... je réalise qu'il n'y a pas assez de vêtements et de souliers
pour chacun… s'ils ont à sortir.

Quant à Carmen, elle a presque tout le temps le même chandail blanc... ce n'est pas une critique, c'est une constatation...

Ils sont orgueilleux... ils savent c'est quoi être bien vêtus et ils font de leur mieux pour bien paraître...
C'est l'heure du départ… on part - 3 enfants, 3 adultes - et on marche jusqu au terminus… j'offre de payer l'autobus... 7 Lempiras par personne - 0.70 cents canadien... on est 5 dans le même banc, donc pour les enfants c'est gratuit. Au total, ça coûte 21 Lempiras, pour aller - soit 2.10 $ canadien...

Au terminus, on prend l'autobus menant à la ville de Tamara... l'autobus est plein... Ricardo m apprend que tout le monde s'en va au même endroit: la prison... soit la prison des hommes, soit la prison des femmes...

Rendus à destination, on descend et on traverse à pied un grand champ sec - en sable... Arrivés à la barrière, on attend que la barrière ouvre… à 9h le gardien laisse entrer les gens… 6 à la fois... puis c'est notre tour… Carmen explique la procédure à Ricardo qui me traduit... « Quand on va te demander qui tu viens voir... tu réponds: Aïda Alonzo... et tu montres ton passeport »... Je fais ce qui m'a été dit… et le gardien me donne la passe # 17.

Carmen donne d'autres consignes à Ricardo qui me les traduit: « On va te
demander d'enlever tes pantalons, dans une pièce réservée aux femmes »... Je lui demande de me dire en espagnol, ce que la / les gardiennes vont me dire...
Il me le dit et ajoute : « N'enlève pas ton pantalon avant qu'elle te le demande, au cas ou elle ne le demande pas »... et on rit de bon cœur.

J'entre dans la pièce où sont les 2 gardiennes... elles me font signe de baisser mes pantalons, puis mes caleçons... elles me demandent ensuite de me pencher et de mettre mes mains au sol à 3 reprises… comme si j'exécutais un mouvement de gymnastique... au cas où j aurais caché de la drogue dans mes parties « précieuses »... au même instant, une des gardiennes touche tout le haut de mon corps… puis elle me dit de me rhabiller et de me diriger vers la prison.

Avant d'entrer dans la grande salle, on me demande de m'identifier à nouveau… par la suite, je suis autorisée à entrer.

À l'intérieur… la salle ressemble à un gymnase… au fur et à mesure que les visiteurs arrivent, ils s'installent un peu partout par terre avec des couvertures, comme s'ils étaient en pic-nic … il y a des bancs tout autour… la salle se remplit à mesure que les prisonnières arrivent.

À un moment donné, une femme vient vers nous… c'est Aïda… elle tient 3 chaises… il y a aussi une petite fille qui la suit… c'est une autre de ses filles… elle se prénomme Danli...

Danli avait 15 jours quand Aïda fut arrêtée... la loi l'autorise à rester avec sa mère jusqu'à l'âge de 3 ans… ensuite elle sera séparée de sa mère et envoyée dans un centre pour adoption.

Fait marquant: Aïda s'est approchée de nous, je lui ai donné la main, bien que limitées par la langue… on s'est regardé… à l'aise de le faire… comme si on se connaissait déjà.

À une autre occasion, j'ai pris Kevin dans mes bras... il pleurait - en fait il pleure souvent - et je lui ai chanté : « Fais dodo Cola mon petit frère... fais dodo t'auras du lolo »... il a fini par s'endormir… j'ai marché en le serrant dans les bras… Ça me rappelle un souvenir : j'ai chanté cette chanson à mon père... dans les derniers jours de sa vie, à l'hôpital. À ces 2 occasions, les paroles de cette chanson sortaient toutes seules de ma bouche...

À propos de Kevin… Kevin pleure souvent… il demande tout le temps le sein de sa maman… et il ne boit pas… ça m'a pris au moins 2 semaines avant d'oser le prendre... puis je l'ai pris et j'ai remarqué qu'à chaque fois que je le prends, il s'endort dans mes bras... ça libère sa maman.

J'ai demandé à Aïda de me raconter son histoire… qu'est-ce qui fait qu'elle est en prison ?… et Ricardo a traduit…

Aïda vivait avec un homme qui la battait elle et ses enfants... « Je l'ai quitté et je suis retournée dans ma famille avec mes enfants... ma famille ne m'aimait pas, je le sentais... ils m'ont mis à la porte... j'étais dans la rue avec mes enfants... un homme m'a offert d'aller rester chez lui et j'ai accepté ».

... il a fait 2 enfants à Carmen…

Pour aider Aïda, il lui a offert comme moyen de gagner de l'argent, d'agir à titre d'intermédiaire entre le vendeur de drogue et l'acheteur... elle a accepté... et elle s'est fait prendre avec 4 autres personnes.

Aïda a assumé la responsabilité de tout sans déclarer le vendeur… en ne déclarant pas le vendeur, elle est assurée de ne pas être tuée à sa sortie… elle fut arrêtée et mise en prison avec sa fille qui était âgée de 2 semaines.

Aïda attend son procès depuis 2 ans déjà... elle n'a jamais eu de sentence... C'est souvent comme cela que ça se passe pour les pauvres là-bas... l'avocat fournit par la ville ne s'occupe pas des gens pauvres.

À midi, une cloche a sonné pour nous aviser de partir. Ricardo s'est éloigné
pour les laisser ensemble. J ai voulu faire de même... je lui ai donné ma main et elle ne voulait plus la laisser... on se regardait… on se regardait… on se regardait… et c'était tout… j'ai l'impression d'avoir retrouvée ma famille d'une époque antérieure… j'en ai la certitude.

Quand Aïda est venue nous rejoindre au tout début, elle avait préparé 3 sandwichs pour ses 4 enfants.... on a partagé entre nous tous... Ricardo a acheté un Pepsi... partout au Honduras, les gens ne boivent que Coke et Pepsi...

Je veux faire quelque chose pour elle... ici à Tegus ou au besoin au Canada, pour qu'elle ait un procès...

Au retour, les jeunes ont dormi tout au long du trajet en autobus... Yuviny a dormi dans mes bras... Nicole dans les bras de Ricardo et Kevin dans les bras de sa maman.

Arrivés à Belen, j'ai pris des photos... en fait, on se passait ma caméra… et chacun prenait des photos… c'était ma dernière rencontre avec tout le monde de Belen... elles nous ont invités à dîner avec eux... on a d'abord refusé... puis Ricardo m'a dit : « Je pense que pour eux, c'est important... elles ont préparé un repas spécial pour nous ».

On a mangé avec eux... c'est Bessy, la sœur de Carmen, qui a cuisiné le repas… elle a voulu faire une lasagne... il y avait aussi du riz, des petits pois, du blé d'inde et du Coke diète.

Elles étaient bien contentes de nous recevoir… elles nous ont dit que c'est la 1ère fois que quelqu'un accepte de manger ici avec eux.

Après le repas, elles m'ont donné un cours de danse… on a pris d'autres photos… puis on a quitté en promettant de leur envoyer des photos.

« J'ai eu une préoccupation face à ce travail, tout au long de mon séjour, à savoir : Comment aider / être là sans éteindre la flamme qui anime leurs yeux ? Comment puis-je contribuer à entretenir cette flamme ?… et j'y suis restée fidèle..»

En résumé…
ce que retiens de mon séjour au Honduras...

- Les yeux sont pétillants… je ne vois pas de dépression… de découragement… et pourtant… les journées sont longues… les taches sont nombreuses… et les revenus sont minces… les gens sont fiers et dignes… l'accent n'est pas mis sur leur manque… ils ne semblent pas « malades » du moins moralement… ils dégagent du dynamisme, dans l'accomplissement de leur train train quotidien…
- Les enfants dans la rue, en garderie… sauf à Belen… portent des souliers solides ou sont pieds nus… même s'ils marchent pieds nus dans la rue ou sur les roches, il n'y a aucune ou peu d'égratignures…
- Dans les autobus, les adjoints aux chauffeurs sont dynamiques… ils font la promotion de leur route pour « emplir » leur autobus…
- Dans les rues, les enfants et les adultes vendent de tout… tout le temps… et ils (les vendeurs) semblent infatigables… À Tegus, on peut partir en affaires avec un sac de bonbons : j'ai vu des enfants aussi bien que des adultes vendre des bonbons dans l'autobus… ils se promenaient qu'avec un sac de bonbons enveloppés individuellement…. l'entrepreneurship est à la portée des gens… les rues de Tegus sont un lieu d'apprentissage propice pour apprendre à faire de la vente… une belle école …
- J'ai aussi vu des réalités moins « belles »… À titre d'exemple, j'ai vu des jeunes respirer de la colle dans les rues du centre de Tegus… j'ai vu des hommes couchés sur le trottoir… j'ai vu des personnes ayant toutes sortes de malformations physiques… j'ai aussi vu des animaux qui n'ont que la peau et les os, avec trois (3) jambes au lieu de quatre (4).
- Dans les quartiers pauvres, les rues sont en terre… tandis que dans les quartiers riches, les rues sont en asphalte… si la tuyauterie des égouts fait défaut dans les rues des quartiers pauvres… ce n'est pas réparé… il est courant de voir l'eau des égouts se répandre dans la rue.
- Les fourmis sont très présentes dans la cuisine… sur les murs, dans les armoires, dans la vaisselle.
- Le souvenir de l'ouragan Mitch est bien présent dans la mémoire des gens… Ici le temps se divise en deux (2) parties : l'avant Mitch et l'après Mitch…

« J'ai visité des villages où les gens portaient la joie dans leur cœur et l'exprimaient tout naturellement… j'ai aussi visité des villages où la tristesse était tout aussi présente.»

En résumé…
… mes réalisations...

À Belen :
- J'ai enseigné le français aux filles de la rue à la maison Belen... aux filles, à leurs enfants, et à tous les petits gars...
- Je me suis une fois, occupé du fils de Carmen et elle a pu pratiquer son
français avec Fernand et Jeanine…
- J'ai endormi Kevin… en fait, j'ai réussi à le calmer… à ce qu'il arrête de pleurer… en le promenant dans mes bras et en lui chantant : « Fais dodo… Cola mon petit frère… fais dodo… t'auras du lolo »… par la suite, Kevin s'est endormi… j'ai réussi cela à 3 reprises…
- J'ai trouvé une relève pour continuer mon travail à Belen...
- J'ai donné à Nicole, Jeanine et Fernand le goût de prendre la relève et ainsi permettre que le projet se continue...
À Flor del Campo :
- J'ai réussi à calmer un bébé nouveau venu, à la garderie Flor del Campo, et à l'endormir en le serrant dans mes bras…
- J'ai montré à un petit garçon du nom de : Omar, à écrire le chiffre zéro... bien qu'il se disait « pas capable » (en espagnol)... au début, il disait... « pas
capable, pas capable, pas capable »... sans arrêt tout en continuant à écrire... J'ai pris sa main et j ai dit : « oui, t'es capable, t'es capable, t'es capable ». Je répétais ces mots sans m'arrêter… comme lui… et tout à coup, il a réalisé qu'il était capable... il était tellement content quand il s'est aperçu qu'il avait réussi. Quelle joie !… ma joie m'est venue de sa joie…
- J'ai chanté des chansons en français pour les enfants... à mesure que les paroles montaient en moi... aussi bien à Belen qu'à Flor del Campo.

En résumé. ..
ce que j'ai surtout apprécié…
- Les échanges avec Martin. J'ai eu beaucoup d'échanges avec Martin lors de nos sorties d'initiation. J'ai trouvé cela très réconfortant.
- Le dévouement de Ricardo. Il était mon compagnon à Belen. Grâce à sa présence, à son engagement, à sa patience et à sa connaissance de l'espagnol, j'ai pu apporter ma contribution à la maison Belen, auprès des filles de la rue. Sans Ricardo, ce projet n'aurait pu avoir lieu. Ricardo animait la première partie de nos rencontres.

- La nourriture de Sally. À chaque jour, Sally préparait un repas complet, nourrissant et apprêté avec goût… comme au temps de mon enfance… et à chaque soir, Martin pétrissait de la pâte… on avait du pain chaud le matin.
- J'ai apprécié de partager la vie familiale de Martin, Sally et leurs enfants : Paul, Syméon et Christophe... Rosa, la femme de jour, Don Leonardo, le gardien de nuit et sans oublier le chien de la maison Goyave…
- La vie de groupe à la maison Clara-Lauzon… Caroline et Hannibal, Francine et Madelena, Christophe, Carole et Raynald, Jeanine et Fernand, Gilles et Jacqueline, Nicole, Jacqueline, Gérard, Marie et Marthe.
- La vie de dortoir avec mes compagnes Caroline et Jacqueline et les échanges qui s'ensuivaient.
- Les montagnes à perte de vue tout autour de Tegucigalpa… l'abondance d'arbres à fleurs et à fruits… dans plusieurs régions, la terre est couleur orange.
- Le quotidien à Tegus… tout m'a paru intégré dans la vie : les enfants ont leur place partout… la politesse dans les autobus… la route est partagée entre tous : autos, autobus, camions, bicyclettes, piétons, animaux…
- Le travail auprès des filles de la rue… Carmen… ses frère et sœur ainsi que ses enfants, sans oublier Aïda, sa mère, Oneyda, Bessy, Adelina, Maiva, Nancy, Mavel, Maritza, Olimpia, Yuviny, Henri, et tous les autres.
- Le travail organisé par Koinonia et la formation suivie avec les mères éducatrices, les assistantes et les cuisinières.
- La disponibilité de l'équipe de « Mer et Monde » à Montréal… Michel Corbeil, Ibou, Andrée, Marie Ève, Dominique et les autres.

« Au Honduras, j'ai rencontré des gens accueillants et chaleureux… je me suis fais des ami(e)s partout où je suis passée… j'ai vécu de franches camaraderies.
J'ai aussi rencontré des « anges gardiens ", dans la partie humanitaire aussi bien que dans la portion vacances. Je reviens enrichie à tout point de vue."


En résumé. ..
ce que j'ai trouvé difficile…

- Le fait de manquer de vocabulaire pour m'exprimer autant que je l'aurais souhaiter en espgnol.
- À Tegus, c'est poussiéreux… j'étais portée à tousser surtout au début.
- J'ai trouvé difficile de voir l'état physique des animaux… je l'ai vécu comme un choc.
- Les soirées peuvent être plates, ennuyantes.
- Dans les premières semaines, je me suis souvent sentie isolée, seule dans le groupe.

Matière à réflexion… pour aller plus loin…

Réflexion sur la richesse et la pauvreté… débutée pendant les derniers jours passés dans le nord du pays

La pauvreté et la richesse sont les deux (2) faces d'un même territoire… on pourrait les comparer aux deux (2) faces d'une main… le dessus représentant la richesse et l'intérieur la pauvreté…

Pour avoir accès à toute la main et pour jouir de toutes ses possibilités… il faut apprendre à la tourner dans un sens comme dans l'autre.

Si les pauvres réussissent à voir et à saisir comment se produit la richesse… ils pourront la produire.

Si les uns comme les autres réussissent à voir ces deux faces… ils auront accès à tout ce territoire… de toute façon, chacun n'y a-t-il pas droit ?

« Je sais… je le sais… c'est simple à dire et à écrire… Comment y arriver ?"

Le mot de la fin

Je suis rendue à la fin de cette riche expérience de travail humanitaire… j'ai vécu des instants précieux… des instants magiques… j'ai appris du neuf sur moi… j'étais venue avec l'intention de partager mes connaissances… et ils ont préféré ma personne… je prends conscience que je suis plus qu'une professionnelle… ma valeur déborde de ma profession.

« Je suis venue avec l'intention de partager mes connaissances… et ils ont préféré ma personne… "



Muchas gracias !

Michèle Clément