Me laisser déstabiliser !

Gilles Charette - Honduras

Je termine un voyage participatif d'un mois, avec l'appui de Mer et Monde. C'est ma première expérience de coopération internationale sur le terrain, ayant cependant œuvré quelques années pour l'organisme Développement et Paix.

J'ai assisté à trois des quatre séances d'information données par Mer et Monde comme préparation au voyage. Les renseignements pratiques pour la préparation matérielle du séjour ici ont été adéquats, complets; mon périple fut donc agréable et sans surprise aucune. Je me demande cependant, s'il n'y aurait pas lieu de formuler une mise en garde spécifique aux patients souffrant de problèmes respiratoires au contrôle précaire, en ce qui concerne le haut taux de pollution auquel ils risquent d'être exposés à Téguz, surtout dans les déplacements en autobus.

La présentation sur la géopolitique du Honduras, m'a semblé une introduction valable.
Durant mon séjour, j'ai cependant réalisé qu'il me manquait certaines informations sur
l'organisation de la vie civile Hondurienne :

-Structure de la mairie et du pouvoir à Téguz
-Structure du pouvoir dans les quartiers
-Organisation de la distribution de l'eau
-Organisation de soins de santé en ville et en campagne
-Fonctionnement de l'éducation
-Influence de la vie religieuse
-Informations plus détaillées sur le mode de fonctionnement de Koinonia
-Précisions sur la place que tient la religion dans le quotidien de l'action de Koinonia.

Ce dernier point a entraîné chez moi et chez quelques coopérants certaines interrogations. Par exemple, est-ce que les nombreuses références religieuses en garderie sont un reflet de la culture du pays, ou plus ou moins imposées par Koinonia?

La vie, à la résidence, a été très agréable, conviviale et fraternelle. Sally et Martin sont l'âme de cette résidence et les catalyseurs de la chaleur qui en émane. Tant pis, pour les quelques kilos que je pensais perdre ici, je devrai les perdre à Rawdon; Sally est trop bon cordon bleu!

Je me dois aussi de louer le travail de Martin et de Ricardo, qui m'ont patiemment tenu la main tout au long de ce voyage. Accompagnement dans le dédale des rues de Téguz, disponibilité constante pour toute forme de support...pour la discussion aussi; discussions dont je suis toujours sorti enrichi à tout point de vue, en particulier sur le sens que peut prendre un engagement, même limité, pour les démunis d'ailleurs. On sent, chez eux, un engagement profond face à leur travail, et ça réchauffe le cœur.

En venant ici, je voulais être déstabilisé dans mes certitudes, apprendre sur le monde et sur moi-même. C'est réussi et... déstabilisant! Maintenant, la misère a un visage pour moi..., le courage, aussi, que j'ai vu à l'oeuvre chez les Honduriens. Je reviens au Québec avec plus de questions que je n'en avais au départ. :par où commencer? Reviendrais-je ici ou ailleurs pour ne faire que de la consultation médicale, dont l'impact et l'utilité réelle sont plus que questionnables, sans une tentative d'action plus globale? Ne devrions-nous pas en venir à mette l'action au second plan pour privilégier le contact entre deux humains et l'élargissement du cœur qui en résulte? Il paraît qu'avant de changer le monde, il faut changer son cœur. Je prends aussi conscience de la grande fragilité de notre action, du projet le mieux planifié quel qu'il soit, parce qu'il est entre les mains de l'être le plus fragile qui soit....l'Homme.

MERCI MER ET MONDE...

Gilles Charette