L'école de la seconde chance

Depuis maintenant près de 2 ans, Mer et Monde au Nicaragua collabore régulièrement avec l’organisation Aprobenir, située à Jinotepe, mieux connue localement comme « l’École technique professionnelle Sol y Luna ». L’institution, dont la notoriété est aujourd’hui manifeste dans le département de Carazo, surgit sur l’initiative d’un  groupe de Belges impliqués dans un projet de coopérative de bicyclette à Jinotepe (lequel se soldera par un échec). Interpellés par la réalité des jeunes enfants travaillant sur le marché de Jinotepe. Ces derniers, ayant délaissé trop tôt les chemins de l’école pour constituer un apport aux revenus familiaux, ou bien victimes des pièges de la violence et de la drogue, voyaient se refermer prématurément toute perspective d’épanouissement.

Les mécènes, sensibles à la précarité de ces jeunes, créent finalement en 1994 l’Association Aprobenir (Association au bénéfice des enfants en situation de risque du département de Carazo) en Belgique, laquelle se consacre à récolter des fonds au profit  de nombreuses familles précaires du Nicaragua. Les donateurs financent de nouvelles toitures, latrines ou  des réparations suite aux dégâts provoqués par l’ouragan Mitch. La vocation humanitaire d’Aprobenir se démarque pourtant d’autres ONG internationales car elle n’offre pas seulement un secours matériel.

Parallèlement, dès 1995, l’association acquiert des infrastructures dans la ville de Jinotepe, avec l’ambition de pouvoir accueillir les enfants des rues dans un espace bienveillant, et leur proposer des activités ludiques et éducatives. Il n’est pas seulement question de pallier les carences scolaires de ces décrocheurs, mais également de leur offrir de véritables alternatives professionnelles, en vue d’une insertion sociale. Aprobenir propose désormais des classes de primaire et de secondaire à des enfants, adolescents et jeunes adultes, mais aussi des formations techniques dans plusieurs domaines : menuiserie, couture et soudure. Les élèves, âgés de 9 à 42 ans, étaient 195 au début de l’année 2015, et sont 139 à l’heure de clôturer l’année scolaire. Afin d’encourager ses élèves écorchés par la vie et de prévenir le décrochage scolaire, des ateliers à vocation psychologique et sociale y sont dispensés chaque semaine. Et comme Aprobenir prétend prendre en charge les jeunes de façon globale, l‘équipe pédagogique, actuellement dirigée par l’énergique Lila Porras, assure aussi un lien étroit avec leurs familles, grâce à des visites à domicile.

Afin de pouvoir assumer les activités de son école, Aprobenir a également mis sur pied une coopérative depuis 2005, spécialisée dans la fabrication de meubles en bois. Les revenus générés par cette « petite sœur » sont aussitôt réinvestis dans les frais de gestion et de maintenance de l’école « Sol y Luna ». L’association incarne un bel exemple d’auto-gestion, à l’équilibre somme toute fragile, étant donnée la raréfaction des fonds alloués aux initiatives de coopération internationale et non gouvernementales. Aprobenir donne cependant la preuve, s’il en était besoin, que le dévouement de quelques personnes peut être au moins tout aussi fructueux que de gros budgets.

Elle illustre également un modèle de réussite de la coopération internationale, telle que nous la revendiquons à Mer et Monde. Si les fondateurs belges continuent de visiter annuellement l’organisation pour s’assurer de son bon fonctionnement et de mobiliser des donateurs en Belgique, le relais a bel et bien été passé à l’équipe locale nicaraguayenne, laquelle relève vaillamment le défi.


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