Mon expérience au
Honduras - Kathleen La Rougery
4 juillet 2002 à 17h00, me
voici en Amérique centrale pour vivre ce projet que je prépare depuis
déjà 6 mois. Dictionnaire à la main je suis enthousiaste
à perfectionner l'espagnol et à découvrir les murs
et coutumes de ce peuple aux yeux brillants. Je franchis la porte de l'aéroport
et je retrouve les visages souriants de Michèle Laberge (formatrice) et
du groupe du collège Brébeuf. Enfin! Je rencontre Martin Couture
cette personne chaleureuse avec qui j'avais déjà communiqué
auparavant et qui était prêt à m'accueillir pour mon séjour
d'une durée de 27 jours (seulement). En descendant de l'autobus, je fais
face à cette réalité bouleversante des jeunes de la rue.
Par l'entremise du vidéo, j'y étais préparé.
Je garderai toujours en mémoire la fraternité qui règne
à la maison Mer et monde. J'avais hâte d'être initié
à la vie en communauté. C'était vraiment une réussite!
34 volontaires Québécois m'attendaient. J'ai été touché
en constatant que déjà plusieurs connaissaient mon nom et étaient
au courant de ma petite mésaventure avec la compagnie d'aviation Taca.
Les valeurs de coopération, de solidarité et de respect furent comme
un vent de fraîcheur tout au long de ma première semaine. Je reviendrai
rejoindre mes nouveaux amis les fins de semaine afin de visiter un peu les alentours
(parc national le Picacho et la forêt tropicale la Tigra). Ricardo, Martin,
Sally et les enfants ont joué un rôle important pour me permettre
de me sentir bien dans la grande famille de Mer et monde. Mes
guides Martin et Ricardo m'ont suggéré de prendre la première
semaine afin de visiter, observer pour ensuite choisir mon lieu de stage. J'ai
eu l'occasion d'accompagner des volontaires dans les garderies de Villa Nueva,
Flor del Campo, Los Pinos et El Sembrador. J'ai également passé
un agréable moment avec les jeunes femmes et leurs enfants au centre Miraflores
(centre qui accueille les filles-mères et qui favorise leur autonomie).
Joie de vivre et humour étaient au rendez vous. Quel bel outil pour créer
un premier contact ! J'ai été initiée
au système d'autobus qui nous permet de nous rendre dans les différentes
colonies qui chapeautent la ville. Quelle animation! Des vendeurs insistants s'immiscent
dans l'autobus afin de nous vendre bonbons, biscuits, eau et fruits. Je ne suis
pas prête d'oublier le sermon évangéliste à saveur
plutôt agressive
Alléluia nous sommes arrivés! Il s'agit
d'un paysage fabuleux composé de montagnes . Cette image des bidonvilles
restera gravé à ma mémoire : pentes abruptes, pollution,
odeurs désagréables et jappements de chiens. J'ai eu la chance
de rencontrer des gens sympathiques et sensibles aux interventions de mes confrères
Québécois. J'ai senti un intérêt de leur part à
s'investir et à s'impliquer dans un engagement social d'une mini entreprise.
J'ai vu des maisons de tout genre; en terre, en brique, en bois, aux toits de
tôles retenus par une vieille bécane. Les enfants
de la garderie sont attachants et c'est si simple de les amuser. Notre présence
semble les combler. C'est avec fierté et bonne humeur que dès notre
arrivée ils entonnent en choeur la chansonnette de Bienvenue. Les éducatrices
sont également ravies de nous voir. Avant mon départ
du Québec, j'avais manifesté à Martin mon intérêt
pour côtoyer des enfants dans le cadre de mon stage . Je désirais
également connaître le système de l'éducation au Honduras.
Mon désir d'habiter dans une famille, de vivre une immersion complète
en espagnol et de saisir les beautés du quotidien étaient également
très présents. Après un bilan avec Ricardo et Martin, nous
concluons rapidement qu'une place m'attend en campagne à Pueblo Nuevo (village
de 2 700 habitants) dans la famille de Bienvenida. Mon expérience
à Pueblo Nuevo Mon objectif à atteindre dans mon milieu
familial et auprès des campesinos est d'être présente et de
saisir le moment. C'est avec grande satisfaction que je constate que mon intégration
se passe à merveille. Par le biais de nouvelles expériences, je
mets mon espagnol à l'épreuve : confection de tortillas, promenades
dans le village et discussions avec des personnes fort intéressantes, réunion
du groupe social des jeunes, soirée dansante organisée par ce groupe,
visite d'une plantation de bananes, visite du centre de santé et participation
à la fête de Lempira avec l'école primaire.
J'ai été agréablement surprise par les différentes
initiatives entreprises par les habitants : Groupe social de jeunes entre
19 et 25 ans : organise des activités, planifie la construction d'un centre
civique, plante des arbres et voit même à régler des problèmes
de caniveaux bouchés. La banque : Tous les vendredis matins les gens
se présentent avec leurs carnets de banque à la maison de Bienvenida
afin de déposer ou retirer de l'argent. Le lendemain , des représentants
du conseil déposeront les épargnes à la banque de Talanga
(ville à 1h30 d'autobus). Les pulperias : Certaines personnes du village
tiennent boutique. Il est possible d'acheter des aliments ou objets utiles : choco-banano,
semitas, rafraîchissements, margarine, ufs, savon, dentifrice, cahiers,
crayons etc
Boucherie : Mon père d'accueil apprête le cochon
avec ail et épices et le vend à la livre. Par la débrouillardise
et la solidarité, il y a beaucoup d'espoir dans ce sympathique village!
Quelques impressions :
- L'électricité existe depuis
seulement 2 ans et la télévision demeure un divertissement important
pour plusieurs.
- Les animaux du village font bon ménage; poules,
coqs, chats, chiens, cochons, ânes et chevaux. Vous ne pourrez pas manquer
les pratiques de la chorale nocturne. Par contre, la chorale ne répète
pas les soirs de pluie.
- En tout temps, les paysans sont disponibles pour
nous piquer une petite jasette.
- Le contact humain passe bien avant la
performance .
- Cela a donc été un petit congé du métro
boulot dodo de la vie Nord Américaine.
- J'ai senti l'intérêt
des gens à apprendre le français et à connaître notre
mode de vie.
- Je garde d'agréables souvenirs de mon séjour
dans ma campagne de Pueblo Nuevo.
Mon stage Dès
notre arrivée, Ricardo me présente à la directrice de l'école
qui semble bien ouverte à m'accueillir pour deux semaines. Étant
enseignante au Québec au 1er cycle du primaire, je manifeste l'intérêt
de m'immiscer dans les classes de 1ère à 6e année. J'ai offert
à chaque profesor ou profesora de donner un petit cours de français.
Avec enthousiasme mes nouveaux élèves se plaisent à me saluer,
à me dire leur nom, leur âge et à répéter quelques
mots en FRANÇAIS. J'ai également profité de l'occasion pour
leur parler des 4 saisons du Québec et de leurs caractéristiques.
Aux récréations , un groupement d'enfants m'entouraient pour regarder
avec admiration mon album de photo. Nous avons même façonné
un bonhomme de neige. Avec l'imagination tout est possible ! J'ai
également offert mon aide aux enfants qui démontraient des difficultés
en mathématique. Un local avait donc été nettoyé afin
que je puisse rencontrer un groupe de 9 enfants de 2 e année. Avec appui
visuel (bâtons de popsicle ou roches), nous avons travaillé le concept
de la soustraction. J'ai également travaillé la division avec des
élèves de 3e année. Ces petits n'ont malheureusement pas
la chance de récupérer les notions non comprises
manque de
ressource. J'ai eu aussi beaucoup de plaisir à jouer avec eux à
la récréation. Je leur ai montré de nouveaux jeux. Des
impressions du milieu scolaire - Grande politesse. Utilisation du
vouvoiement. Les enfants n'appellent pas les enseignants par leur prénom.
C'est plutôt PROFÉ. Mot couramment utilisé également
entre les enseignants.
- Activités avec l'école en lien avec
la vie culturelle et traditionnelle.
- Des représentants de classes
se réunissent sans supervision pour organiser une activité pour
la prochaine fête. WOW ! Quel sérieux et quel respect de la part
de chacun.
- La fanfare de l'école témoigne d'un don inné
chez les jeunes pour le sens du rythme.
- Classe de 2e année trop
nombreuse : 52 élèves pour une enseignante!
- Il n'y a pas
de suppléant alors si l'enseignante est malade ou doit s'absenter
c'est congé pour ses élèves. Une enseignante de maternelle
en haut de la montagne est présentement en congé de maternité
donc congé pour 3 mois.
- Les programmes pédagogiques sont
drôlement divisés. Je n'ai pas trouvé que le rythme d'apprentissage
de l'enfant était considéré. La multiplication et une initiation
à la division sont au programme de 2e année. J'ai rencontré
des élèves de ce niveau qui n'avaient pas encore intégré
le concept de la soustraction.
- Je n'ai vu que des enseignements magistraux.
L'enfant n'a pas de place pour exercer son esprit critique. Il y a très
peu de travaux d'équipe. Il manque de vie et d'interaction dans les situations
d'apprentissages.
- Je constate que les enfants sont très timides.
Ils n'ont pas l'occasion de s'exprimer et de prendre la place qui leur revient.
Attention à la motivation !
- Certains élèves reprennent
une année 3 fois. OUF!
- Grand manque de matériel;
les enfants n'ont pas la possibilité de manipuler du matériel afin
de rendre plus concret les concepts abstraits. Il sagit d'un enseignement s'adressant
uniquement aux auditifs.<
- Les élèves arrivent nu pieds
ou en gougounes. Plusieurs n'ont pas mangé mais peuvent s'acheter des bonbons
ou des chips à l'école. C'est pas très cher mais surtout
peu nutritif.
Certains n'ont pas suffisamment d'argent pour s'acheter un nouveau
cahier d'écriture ou un nouveau crayon. Ce n'est vraiment pas facile
d'écrire avec un petit bout de crayon ! Comparaison avec
notre système d'éducation Je n'ai pu m'empêcher de
comparer avec l'éducation au Québec. Ce que je connais dans mon
école à St-Pie, c'est un enseignement interactif où l'on
se sert du bagage de l'enfant pour créer une situation d'apprentissage
stimulante. L'enfant est placé au centre de ses apprentissages. L'enseignant
joue le rôle de guide et tentera de varier son enseignement afin de respecter
les différents styles d'apprentissages (visuel, auditif et kinesthésique).
Les pédagogies sont variées et respectent le rythme de chacun (ex
:pédagogie par projet). Nous essaierons par le biais
du conseil de coopération, à chaque semaine, de permettre à
chacun de s'exprimer et de prendre sa place au sein du groupe. Pourquoi les
enfants n'auraient ils pas le droit de décider ensemble de la fête
de Noël qu'ils aimeraient vivre en classe ? Les trames de fond de la réforme;
faire de nos élèves des citoyens autonomes. Apprendre dans un contexte
stimulant et en lien avec le vécu de l'enfant. J'y crois à 100%! UN
RETOUR J'aimerais bien retourner à l'école primaire San
Franscico Morazan où j'ai senti une ouverture de la part des enseignants.
Ils me questionnaient sur ma façon d'enseigner et semblaient très
reconnaissants de l'aide que j'ai apporté durant mon court séjour.
Si je retourne, j'aimerais établir un horaire permettant d'offrir à
l'intérieur des heures de cours ,une aide pédagogique en mathématique
aux enfants éprouvant des difficultés. Il s'agit du rôle que
jouerait un orthopédagogue au Québec. J'aimerais
également mettre sur pied une troupe de théâtre avec la collaboration
d'enseignants de l'école. Cela nous permettrait de travailler l'estime
de soi, développer la compétence de la communication orale et également
de maintenir ou de retrouver la motivation de venir à l'école. Tout
en étant présente aux évènements culturels proposés
par le milieu, je pourrais proposer des situations d'apprentissages stimulantes
nécessitant l'implication des élèves. Il serait sûrement
possible de favoriser un échange entre les différents niveaux. (Par
exemple, par la réalisation d'un projet d'écriture entre les classes
avec installation de boîtes aux lettres et présence de facteurs).
J'ai vu tellement de potentiel chez ces enfants aux yeux brillants. Les
enseignants sont sous payés et les conditions de travail exécrables.
Ces guides ont-ils perdu la motivation, existe-t-il chez eux cette passion pour
l'enseignement ? Mes remerciements Pour la réalisation
de ce projet, plusieurs personnes m'ont apporté leur soutien. Leurs
présences et leurs encouragements m'ont été très précieux. Je
désire remercier l'organisme Mer et monde de m'avoir permis de vivre une
si belle expérience de coopération. Merci à l'équipe
de formateurs de Montréal pour la transmission de leurs connaissances et
de leurs passions. Merci à Ricardo, Martin, Sally et la famille pour
le chaleureux accueil et leur appui tout au long de mon séjour. Merci
à Patrice, mon agent de voyage qui a su régler avec professionnalisme
la situation avec Taca me permettant ainsi de partir pour le Honduras. Je
termine en remerciant ma famille, mes amis et mes collègues de travail
pour leurs encouragements et leur écoute de tout instant. Hasta
luego Mar y mundo ! Kathleen. |