Rapport de stage - Honduras

26 décembre 2001 au 10 janvier 2002
De : Carole Gagnon et Raynald Gagné

À tous les gens de Mer et Monde qui nous ont permis de réaliser notre rêve…
À tous les enfants de la garderie Villa Nueva qui nous ont tant comblés…
À tous ceux et celles qui nous ont supportés dans notre projet…
Un rêve…qui se partage.
A l'automne 2001, je (Carole) suis toujours à la poursuite d'un très vieux rêve : partir à la rencontre de gens d'une autre culture et me rendre disponible pour partager avec eux. Je suis également de plus en plus décidée à donner un sens nouveau à la " période des fêtes". C'est donc au début de l'automne 2001 que je m'adresse à l'organisme Mer et Monde : Je suis séduite par le premier contact avec Michel Corbeil et sa façon de présenter l'implication de Mer et Monde au Sénégal et au Honduras ... Le rêve est possible, il existe un endroit, des projets réalisables… Une préparation est offerte. Suite à une discussion avec mon conjoint, nous sommes d'accord pour vivre ensemble cette expérience. L'enthousiasme y est déjà et, d'une certaine façon, nous sommes déjà " en route " bien avant de partir.

Étant donné qu'on travaille tous les deux, on ne dispose que d'une courte période de temps (15 jours à peine) pour vivre cette expérience. Nous voulons donc avoir un projet précis qui nous permettra, dès notre arrivée, d'être sur le terrain… On se prépare du mieux qu'on peut; apprendre sur le pays, se familiariser avec l'espagnol, être en contact avec Martin au Honduras pour trouver l'endroit où on pourrait être utile et, bien sûr, rêver …

Du rêve à la réalité…
Le 26 décembre 2001 : Arrivée dans la foule de l'aéroport de Tegucigalpa: Martin nous attend à la sortie et fait tout de suite disparaître les quelques appréhensions qu'on pouvait avoir devant l'inconnu. En effet, comment ne pas se sentir réconfortés par l'accueil chaleureux offert aux nouveaux "gringos " par Sally, Martin et leurs trois enfants. Martin demande si on se sent prêts à se " jeter à l'eau " dès le lendemain matin; les mères éducatrices des garderies n'ont jamais eu l'occasion de prendre des vacances et, puisque nous pouvons nous rendre disponibles pour les enfants, la garderie de Villa Nueva restera ouverte pendant la période des Fêtes. L'objectif est de permettre aux enfants, dont les mamans doivent aller travailler, de passer leur journée en terrain sécuritaire et connu plutôt que de se retrouver seuls à la maison ou dans la rue. Pour nous, il s'agit donc de faire de notre mieux pour que les enfants s'amusent, qu'ils soient biens… On ne sait rien de leur routine à la garderie; on tentera donc de leur faire passer de belles " vacances "…

La garderie de Villa Nueva est située dans un quartier démuni et en montagne, aux abords de Tegucigalpa. Le premier matin, Martin nous y accompagne et, comme plusieurs des enfants ne savaient pas que la garderie demeurait ouverte, il nous fait découvrir ce quartier en se promenant avec nous et en allant chercher les enfants à la maison, dans les rues… Le " recrutement " fonctionne très bien et on se retrouve avec une quinzaine de petits prêts à passer leur journée avec nous… Le jour suivant, c'est près de 30 enfants qui nous attendent à notre arrivée à la garderie!!!

Pour chaque journée passée à Villa Nueva, nous avons la chance inouïe d'être accompagnés de coopérants de Mer et Monde maîtrisant l'espagnol; Martin, Caroline, Ricardo, Michèle et Francine qui a passé trois jours avec nous en nous faisant bénéficier de son expérience d'enseignante à Montréal. Cette présence a grandement facilité le contact avec les enfants et avec les adultes qui étaient présents à la garderie; Ilda qui s'occupait de la nourriture pour tous, Leila et Carlos qui étaient responsables d'un groupe d'enfants plus âgé qui faisait du rattrapage scolaire…


Le premier regard…
Les constats des tous premiers jours;
Nous étions un peu surpris (mais aussi ravis) par l'accueil de la grande majorité des enfants qui venaient spontanément à nous, qui nous demandaient très souvent de les prendre et qui nous démontraient énormément d'affection…

Toutefois, l'âge des enfants était très varié : de 14 mois à 9 ans. Il nous fallait donc essayer de trouver des activités qui permettaient de garder l'intérêt de tous et chacun. Le matériel de bricolage et de dessin que plusieurs personnes de Montréal nous avaient offert avant notre départ a été d'un très grande utilité ; les enfants ont apprécié les activités de coloriage (…et il fallait parfois se montrer très persuasifs pour tenter de les amener à faire autre chose!)

La présence du groupe d'enfants plus âgé (de 10 ans à 14 ans) qui faisait du rattrapage scolaire et qui partageait la garderie avec nous posait parfois des problèmes; attirés par nos jeux avec les petits et par la présence de personnes nouvelles, ils venaient fréquemment déranger les activités. Cela compliquait la "discipline" qu'on essayait tant bien que mal d'établir et il devenait alors un beaucoup plus difficile de garder le contrôle sur un groupe de 15 à 25 enfants selon les jours.

Enfin, les besoins matériels de la garderie nous paraissaient immenses et nous étions préoccupés par l'aspect peu sécuritaire de l'environnement des enfants : les jeux extérieurs étaient plutôt mal en point, il y avait des débris dans la "cours" et même planches en vrac avec des clous ou encore un amoncellement de déchets brûlés… On ressentait donc un certain stress qui nous amenait à nettoyer la cour avant l'arrivée des petits, et à tenter de réparer les balançoires avec les " moyens du bord "… On devait également s'adapter aux ressources disponibles ; pas d'eau courante (et donc pas de gaspillage!)… Lorsque la couche de coton (et le bébé…) sont souillés, il faut savoir se débrouiller !!!

Le second regard…
Au fil des jours notre regard change… À la garderie, ce sont les sourires des enfants qui attendent notre arrivée le matin, le fait de les connaître par leurs noms, de mieux reconnaître les besoins de chacun qui deviennent vraiment importants. Les enfants nous initient à leurs rondes, à leurs chansons…

Les plus âgés deviennent des complices; nous savons qu'ils sont les grands frères ou grandes sœurs de nos tout-petits et nous prenons plaisir à partager certains de leurs jeux.

Le quartier de Villa Nueva est de plus en plus beau à nos yeux … On apprécie le temps qu'on prend pour marcher jusqu'à la garderie, pour voir les gens qui vivent autour de nous… Des femmes nous sourient lorsqu'elles nous croisent … Des enfants nous font des joyeux " hola! "; une maman dont les enfants fréquentent la garderie s'arrête pour nous parler, pour nous remercier de notre présence…

Notre regard n'est donc plus porté sur ce que ces gens n'ont pas, mais bien sur ce qu'ils sont. Et on se rend compte qu'on est bien dans ce milieu de vie… tout simplement.

"Quand ton esprit n'est pas encombré de choses inutiles c'est la meilleure saison de la vie" Wu-Men


La vie à la maison Mer et Monde
La vie à la Casa Clara Lauzon a grandement contribué à la richesse de notre expérience; on s'y est senti à l'aise dès les tous premiers jours. C'est à la maison Mer et Monde, en compagnie des autres coopérants, qu'on passera nos soirées à discuter des projets de tous et chacun et à préparer les activités du lendemain.

Martin, Sally et Ricardo nous font profiter au maximum de nos moments de liberté et nous font découvrir d'autres facettes du pays : Visite de ressources pour jeunes de la rue, d'une ressource pour personnes sidéenne, le village de Pueblo Nuevo…et poursuite des discussions lors de plusieurs sorties qui nous font découvrir la beauté de ce pays…
La vie de groupe nous apportait beaucoup et nous nous sommes rapidement attachés aux personnes avec qui nous partagions notre quotidien. Par exemple, nous gardons un souvenir inoubliable de la veille du Jour de l'An à la maison de Mer et Monde : Après avoir partagé un repas tout à fait exquis, préparé par Christophe, un coopérant qui avait autant de talents en cuisine qu'avec les jeunes de la rue, nous nous sommes tous retrouvés sur le petit balcon de la maison. À minuit nous nous souhaitions la bonne année en regardant Tégucigalpa, tout autour de nous, qui s'illuminait de feux d'artifice. Un moment précieux… parmi plusieurs autres passés à la maison de Mer et Monde.


Les difficultés rencontrées...
Au fil des jours, nous avons ressenti un besoin réel de communiquer davantage avec les adultes qui nous entouraient à la garderie ou que nous rencontrions lors de nos visites à d'autres organismes. Malheureusement, notre connaissance de la langue espagnole était insuffisante pour pouvoir approfondir les échanges et nous avons quelque fois eu l'impression de " rendez-vous manqués" avec des honduriens et honduriennes.

Nous avons aussi connu une certaine déception à la garderie. Un jour la mère éducatrice est venue, à l'improviste, rendre visite aux enfants et son attitude nous a surpris; elle vérifiait tout, demandait si nous avions bien géré la feuille des présences…Ses remerciements à notre égard étaient accompagnés de commentaires sur ce que nous aurions dû faire. Cette situation nous a fait l'effet d'une douche d'eau froide. Aurait-il été possible de clarifier, dès le départ, les attentes qu'elle avait par rapport à notre présence et de voir si cela correspondait à ce que nous pouvions offrir? .. Après discussion avec Martin et Ricardo nous avons pu nous centrer à nouveau sur notre but premier et poursuivre notre implication à la garderie avec beaucoup, beaucoup de plaisir.

Le retour au Québec…
Cette expérience, nous l'avons vécu à deux. Nous en reparlons souvent … Nous avons l'impression, tous les deux, d'avoir reçu beaucoup plus que ce que nous avons donné. Ce retour nous permet de rêver à un nouveau départ. Quand ? Le plus tôt possible… La clé nous a été donnée ; ce qu'on a découvert c'est qu'elle nous ouvre plusieurs portes …à nous maintenant de poursuivre notre rêve et de réaliser de nouveaux projets.

Carole
et
Raynald

Album photos de Carole et Raynald